Une Petite Sœur de l’Assomption à l’Arche de Jean Vanier

Une Petite Sœur de l’Assomption à l’Arche de Jean Vanier

Je m’appelle Yvette, je viens de faire mes vœux perpétuels en RDC le 31 août. Dans le  parcours de ma préparation, on m’a proposé un stage apostolique de 3 mois à l’Arche de Jean Vanier

C’est ici le moment de vous partager mon expérience. En effet, l’arche est un centre qui accueille des personnes avec un handicap mental et physique. Cette expérience m’a fait découvrir le monde des personnes handicapées pour la première fois de ma vie. Accepter leur fragilité et les aimer est une grâce, cela s’apprend peu à peu. Et c’est le lieu aussi où j’ai pu témoigner de ma vie de petite sœur proche des pauvres et des plus petits.

Quand la communauté m’a proposé de fréquenter ce centre, je l’ai accepté sans condition. Le premier jour a été, comme d’habitude, un jour de découverte et de rencontres.
En arrivant au foyer de vie, j’ai rencontré trois femmes dans la salle à manger qui attendaient des bénévoles pour les accompagner à prendre leur douche. Soudain, j’ai pensé à l’Evangile de la personne handicapée qui attendait, au bord de la piscine, l’aide d’une personne pour la plonger dans l’eau quand celle-ci se mettait à bouillonner.
J’étais très touchée par le fait que ces femmes dépendaient de notre aide. Dans le foyer où j’ai été rattachée pendant ce temps, vivent trois femmes et quatre hommes, tous handicapés mentaux  et physiques. Ils forment une communauté de sept personnes avec des assistants et chacun accepte sa fragilité et celle de l’autre. Je me suis intégrée dans leur mouvance, le dialogue s’est déclenché entre nous par une petite présentation et mon nom est resté dans leur bouche. Pour  ma part j’ai appris à retenir le prénom de chacun. Ils sont devenus mes amis de tous les jours.

J’ai admiré très profondément l’initiative de Jean Vanier, de donner de la valeur à toutes ces personnes handicapées. Cette considération est moins grande dans mon pays où ces personnes sont souvent maltraitées, moins valorisées et elles sont parfois prises pour des victimes qui portent des malédictions, alors qu’ici, elles ont les mêmes droits que tout le monde, car elles ont des qualités et des potentialités.

Ce que j’ai en plus aimé, c’est qu’on donne la possibilité à chaque personne de vivre, de développer ses dons. J’étais impressionnée par ce qu’elles font, malgré leurs fragilités.
Dès le début, j’étais accompagnée par cette parole de Dieu qui m’a beaucoup encouragée et soutenue :
« Chaque matin, il éveille mon oreille pour qu’en disciple j’écoute (Is. 50,4) ». Le Christ m’attend tous les jours à l’Arche, je pars le rencontrer, Lui qui n’a ni mains ni pieds pour travailler, c’est à travers les miens qu’il réalise sa mission, par des petits gestes de la vie courante. J’aide Jésus à continuer sa mission par ces petits gestes simples d’amour et de tendresse.

J’ai découvert le visage du Christ pauvre, dans ceux des handicapés. J’ai rencontré Jésus à travers ces personnes. Avec elles, la relation s’est nouée facilement, compte tenu du tempérament de chacune.

J’ai développé aussi ma patience envers elles, car sans la patience on ne peut rien faire, et c’est une véritable école. J’ai grandi dans le sens de la responsabilité parce qu’il s’agit d’une lourde charge. Cette expérience m’a beaucoup touchée et aidée : voir vivre ensemble les handicapés mentaux qui forment une communauté fraternelle, unie, comme les enfants d’une même famille. J’ai aimé et j’ai été vraiment touchée de l’attention qu’ils ont les uns envers les autres, ceux qui ont moins de fragilités se mettent au service de ceux qui sont les plus faibles en leur portant un regard d’amour.

Je me suis sentie interpellée: j’ai tous mes sens au complet, et pourtant,est ce que ces petits gestes ne me coûtent pas ? Ils vivent des tensions entre eux, et  après quelques minutes, ils se réconcilient et reprennent la vie, c’est un mystère. Les mots « pardon » et « merci » ne manquent jamais dans leur bouche. J’apprécie ces aspects.

Jean Vanier disait : les tensions sont des moments nécessaires dans la croissance et l’approfondissement d’une communauté. La qualité essentielle pour vivre en communauté est la patience.

Aujourd’hui, pour moi les handicapés sont des signes visibles de la présence de Dieu, les plus petits et pauvres qui sont les préférés de Jésus. Je suis très contente de ce que Dieu a mis sur mon chemin pendant ce temps.

« Seigneur montre-moi les pauvres … », disait Antoinette Fage (notre fondatrice) et Il me les a montrés.

Je n’ai pas choisi le lieu pour effectuer mon stage mais Dieu a inspiré la communauté. Je ne peux qu’en témoigner ma gratitude, parce que ce lieu m’a transformée, et je sais désormais comment être attentive et  aborder une personne avec un  handicap.

La confiance nous éloigne de la peur, je suis à l’aise avec mes amis de l’Arche, je demande toujours à Dieu la grâce de les aimer. Quand nous nouons avec eux une relation d’amitié et d’estime, ils accèdent à une grande joie. La malédiction initiale se transforme en bénédiction. Créer des liens simples, comprendre que cela nous transforme et que cela nous rend plus heureux, c’est ce que j’ai expérimenté avec les handicapés.

Le jour de mes voeux définitifs à Kinshasa

Yvette (Petite Soeur de l’Assomption)

2 réponses

  1. Eliane de Montebello dit :

    Merci Yvette pour ce témoignage.Que tout ce que tu as découvert t’anime jour après jour.

  2. Maître Prince-Héritier BINTENE MASOSA dit :

    Heureux et fier de toi, suis-je, car tu as franchi le cap des vœux perpétuels avec abnégation, et reconnaissants sont tous que tu as su accompagner durant ton parcours, par la grâce de Dieu, avec le concours de tes ainées dans la vie religieuse. Tiens fort pour le reste de ton temps et que ton chemin demeure éclairé par cette lampe ardente que tu as portée dans tes mains le jour de tes vœux perpétuels, comme pour dire « Tu es sacerdos in aeternum, secundum ordinem Melchisédech ». Bonne vie à toi

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